les pêcheurs et l'éolien

Le Comité régional des pêches de Nouvelle-Aquitaine notamment vient de se prononcer contre le projet éolien en mer.

« On avance dans le brouillard et, par définition, les marins pêcheurs n’aiment pas ça ! »

Avec un sens certain de la formule, Johnny Wahl dit « non » au projet de parc éolien en mer d’Oléron. Le président du tout nouveau Syndicat national des artisans pêcheurs n’est pas le seul à faire entendre son opposition. Consulté la semaine dernière, le bureau du Comité régional des pêches maritimes de Nouvelle-Aquitaine a lui aussi voté contre, à l’unanimité de ses membres.

Longtemps étouffé sous la chappe des hésitations gouvernementales, le sujet est revenu au premier rang le 22 janvier dernier. Ce jour-là, le Premier ministre a annoncé lors du Comité interministériel de la mer la saisine de la

commission nationale du débat public sur le projet. Une annonce dont se sont saisis des marins pêcheurs pour exprimer un changement de cap. Une opposition qui contraste avec leurs avis antérieurs. Jusqu’ici, le vent dominant de la profession soufflait en faveur du parc ou, a minima, dans une demande d’être impliqués dans le projet pour ne pas subir le pire : la fermeture à la pêche du parc éolien.

Les nuisances pointées

Johnny Wahl rappelle : « Honnêtement, il y a six ou sept ans, j’aurais dit “l’éolien c’est formidable”. » Pourquoi l’artisan pêcheur a-t-il changé de position ?

« Nous avons aujourd’hui sur l’éolien en mer des retours que nous n’avions pas alors. »

Le professionnel s’interroge ainsi sur le probable changement d’emprise du projet d’Oléron qui, de « 100 à 110 km2 à l’origine passera à 300 km2 ». Il redoute aussi son rapprochement de la côte : « On était au-delà des 12 milles et à présent, on est dans la bande des 6 milles. »

Les nuisances sont aussi pointées. Pollution visuelle avec, selon le type de machine installée des « pales qui s’élèveront à 260 mètres de hauteur » ; et environnementale, au travers de la dégradation et de la dispersion dans le milieu de particules de zinc et d’aluminium des « anodes sacrificielles », ces charges métalliques ajoutées aux parties immergées de l’éolienne pour subir le phénomène d’électrolyse en lieu et place du mât de l’installation.

Le marin redoute encore la proximité du parc avec la voie qu’empruntent les cargos pour remonter au Grand Port maritime de La Rochelle et les risques d’accidents maritimes. Mais surtout, il déplore que l’emprise retenue pour le projet corresponde à des zones de pêche intenses où travaillent les flottilles du département de la Charente-Maritime (Cotinards en tête), mais pas seulement.

Dire « non » et argumenter

Président du Comité départemental des pêches maritimes Poitou-Charentes et membre comme Johnny Wahl du comité régional, l’Oléronnais Philippe Micheau s’est aussi exprimé contre le projet lors de la consultation lancée via internet à la fin de la semaine dernière. Il dit « non » et se veut « réaliste ».

« Quand tu entends les ministres parler, les engagements européens sur l’énergie, que tu vois le retard de la France sur le sujet, le parc d’Oléron se fera. »

Le responsable professionnel n’entend cependant pas céder à la fatalité. Il veut que ce « non » soit le point de départ d’un véritable dialogue avec l’État dans lequel les pêcheurs feront valoir leurs priorités : « Il faut que nous puissions y travailler, et que la pêche soit le premier acteur pris en compte. Il faut par exemple que l’écartement entre les éoliennes nous permette de travailler et que les choix techniques ne soient pas a minima, mais de vraies décisions prenant en compte nos intérêts économiques. Parce que ne pouvons pas nous passer de cette zone. Ce n’est pas aux pêcheurs de s’adapter au parc éolien, mais au parc de s’adapter à nous.

L’avis des pêcheurs change !